Daniel Dezeuze, Vade-mecum II : Le Salon noir et quelques Grotesques
17 janvier - 29 mars 2003

Si le travail de Daniel Dezeuze a déjà été montré à plusieurs reprises par la galerie ces dernières années dans le cadre d’expositions thématiques, il n’avait pas encore donné lieu à un projet monographique.
C’est chose faite en ce début d’année 2003 puisque la galerie présente, du 17 janvier au 29 mars, une remarquable exposition constituée par une soixantaine de dessins inédits.
Cette exposition est organisée simultanément à un autre volet du même projet, Vade-mecum I : Des grotesques qui se déroule du 15 janvier au 30 mars au Centre d’art d’Ivry-sur-Seine (Galerie Fernand Léger).
Une publication est d’ailleurs coéditée par la galerie, le centre d’art et Lithos – art contemporain (Saint-Restitut) qui reprendra au printemps Vade-mecum I.
Ces deux rendez-vous peuvent être considérés comme un événement puisque le travail graphique de Daniel Dezeuze n’a pas fait l’objet d’une présentation aussi conséquente depuis l’exposition du Centre Georges Pompidou (Cabinet d’art graphique du Musée national d’art moderne) en 1993.

Tout à la fois acte et œuvre fondatrice : le châssis de bois que présente Daniel Dezeuze en 1967 tel quel, simplement apposé contre un mur. Cette volonté de démystifier la peinture, et de s’interroger sur sa place dans la société, il la développe au sein du groupe Supports-Surfaces, dont il est l’un des fondateurs en 1970.
Le concept du châssis lui inspire alors ses premières Echelles, Triangulations et autres Colombages. Ces œuvres ont en commun de structurer le vide et d’influer sur la perception même de l’espace qui les reçoit. Les Gazes et Tarlatanes (dès 1973) poursuivent cette logique mais dotent le travail d’une dimension plus picturale.
Cette dimension picturale est également présente dans ses travaux des années 90 qui renouent, par l’utilisation du treillis, avec des œuvres de ses débuts : les étonnants Extensibles (d’ailleurs montrés à Nancy dans deux expositions collectives en 1999 et 2002), où il nous donne à voir le revers des peintures.
Mais le dessin reste le ciment de sa démarche. “Le dessin est nécessaire”, écrit l’artiste. “Aucune autre activité ne peut le remplacer”. Après Guerres et forteresses dans les années 80, Dezeuze s’est tourné vers la nature pour réaliser un de ses ensembles de dessins les plus connus, La Vie amoureuse des plantes.
Les œuvres graphiques les plus récentes s’inspirent des Grotesques, que l’on trouve dans la peinture italienne du XVIème siècle, ces figures imaginaires et décoratives qui sont un pied de nez à la tradition savante de la perspective picturale.
Les feuilles présentées dans les expositions de Nancy et d’Ivry, pour la plupart entièrement inédites, fourmillent de formes organiques, achevées ou en gestation, plus ou moins énigmatiques, comme en suspension dans l’espace.
Uniquement exposé à Nancy, Le Salon noir (des dessins à fond noir dits “hérétiques”) est d’une autre veine. Cette série, qui touche au sacré, aux hérésies, au gnosticisme, quitte le monde des Grotesques pour celui des religions persécutées, donc déformées (même dans leur expression graphique). “Il y a quelque chose là, d’une fiction”, selon Dezeuze.
Cet ensemble, plus grave, se relie néanmoins au groupe des Grotesques car il s’agit également pour l’artiste, “d’aller soutirer dans les marges des religions ou de l’art des réalités toujours déformées par les courants dominants de leurs époques respectives”.