D’une certaine façon, Sylvie Antoine répond à à une question qui embarrasse beaucoup d’observateurs de l’art aujourd’hui : où en est la peinture ?
Du 28 mars au 23 mai, la galerie présente une exposition exclusivement réalisée par l’artiste autour de ce médium, dont elle use lorsque le projet l’impose, au même titre que la photographie, le dessin, etc.
Si les constituants des peintures de Sylvie Antoine sont ceux qui relèvent traditionnellement de cette technique — couleurs (huile ou acrylique), toile (lin ou coton) et châssis — son interrogation est résolument contemporaine et s’inscrit dans un siècle de peinture abstraite, rappelons-le si besoin.
Formellement, le spectateur pressé ne pourrait y voir a priori qu’un nouvel avatar néo-géométrique pour reprendre une formulation prisée par la critique dans les années 1980 ; en fait, Sylvie Antoine poursuit au-delà de cet “écran” une recherche plastique, fondée il y a plusieurs années, ayant pour vecteur un principe de travail auto-déclaré, “générer une description appropriée du réel” — ou en détournant une formule de François Morellet “L’Art-Présentation” — dans le cadre duquel elle s’empare de genres picturaux récurrents dans toute l’histoire de l’Art.
Avec ces peintures entreprises depuis 1996, Sylvie Antoine se livre en quelque sorte à une fausse analyse spectrographique, sous la forme d’une mise à plat picturale de la gamme chromatique renfermée par des fleurs, opération purement rétinienne, spéculative et donc sans caractère scientifique.
Ces fleurs sont non seulement élues par l’artiste pour leur nuancier très élargi mais aussi pour leurs dénominations, évocatrices voire poétiques : « Ruban d’amour », « Pensée », « Souci », « Désespoir du peintre », « Vergiß mein nicht » (le myosotis en allemand), sans oublier les roses dont il existe, comme chacun sait, un impressionnant nombre de variétés, d’ailleurs parfois affublées de patronymes d’artistes célèbres.
Ces végétaux induisent le format des châssis des tableaux, invariablement d’une section de 4 cm de côté, de manière à ce que la peinture, dont la tranche est peinte, puisse affirmer sa matérialité.
L’exposition réunit un ensemble d’œuvres très récentes, réalisées spécifiquement dans l’optique de ce projet. Elle donne lieu également à l’édition d’un multiple original, Rubans d’amour.